Le Camélia Patrimoine et savoir-faire Lemarié - Plumassier François Lesage - Brodeur
Texte fournit aimablement par la maison CHANEL
à l'occasion du centenaire des ateliers du Moulin de la
Fleuristerie ARTamin', fournisseur de pistils, étamines, bourgeons, coeur de fleurs
pour la création. LE CAMELIA ET CHANEL : UNE HISTOIRE DAMOUR Chez Chanel, cest toujours le temps des camélias. Dune saison à lautre, ils réapparaissent, toujours renouvelés mais toujours fidèles à lesprit de Mademoiselle dont ils étaient la fleur de prédilection. Symbole damitié, délégance, dharmonie, connus depuis des millénaires en extrême Orient, les camélias ne sont arrivés en Europe quau 18ème siècle pour y connaître une grande vogue au siècle suivant. La Dame au camélias, célèbre courtisane immortalisée par Alexandre Dumas puis par Verdi dans la Traviata, leur doit sa légende et son surnom. Les femmes les préféraient en bouquets, quant aux hommes, il paraient la boutonnière de leur habit dune seule fleur. Est-ce cette séduction androgyne qui a séduit Chanel ? Ou est-ce sa blancheur somptueuse dans sa simplicité qui la définitivment conquise ? Le mystère demeure Mais le camélia est désormais lié à son nom. Si Mademoiselle le portait blanc et en tissu, il se décline depuis dans des couleurs et des matières toujours plus inattendues. Mais aujourdhui encore des mains expertes au savoir-faire unique découpe les pétales de tissu, les gauffrent à chaud, avant de les fixer un à un autour de leur tige, faisant éclore les fleurs qui viendront ponctuer les cheveux ou le revers des tailleurs. En or, en diamant, en onyx, ou en cacholong, la haute joaillerie Chanel en a aussi fait le plus bel ornement de précieuses parures. Eblouissant ou discret, fleur ou bijou, emblématique toujours, le camélia est uni à CHANEL par une belle histoire damour dont un nouvel épisode secrit avec lexposition « Créafleurs les savoir-faire de la fabrication de fleurs ».
Desrues, parurier ; Lemarié, plumassier ; Lesage, brodeur ; Massaro, bottier ; Michel, modiste. Cest en juillet 2002 que CHANEL annonce officiellement la reprise de ces cinq sociétés, surnommées par Karl Lagerfeld nos « Satellites », et sans lesquelles la Mode française ne serait pas ce quelle est. « Notre démarche relève dun choix culturel, dune volonté daffirmer notre attachement à ces entreprises avec lesquelles nous partageons depuis longtemps des exigences de qualité, dexclusivité et dinnovation » - affirme-t-on chez CHANEL - « Il sagit dun véritable investissement sur la création qui, au-delà de la préservation dun patrimoine et dun savoir faire uniques, doit aider ces entreprises, qui demeurent indépendantes, à se développer, à innover mais aussi à former de nouveaux talents pour assurer la pérennité de nos métiers. » |
LEMARIE, plumassier : le culte de la plume et la culture du camélia En 1946, on comptait à Paris 277 plumassiers. En 1960, il ny en avait plus que 49. Aujourdhui Lemarié reste pratiquement seul en France. Cest un métier en péril et un patrimoine unique que CHANEL a voulu préserver en reprenant cette maison fondée, il y a plus dun siècle par Palmyre Coyette, la grand-mère dAndré Lemarié, à lépoque des chapeaux volières. Le patrimoine, ce sont les archives, les souvenirs, les tours de main. Ce sont aussi des trésors irremplaçables, couchés dans de grands tiroirs : aigrettes, oiseaux de paradis, plumes de vautour, de cygne, de paon qui font maintenant partie des espèces protégées. Mais lautruche simporte dAfrique du sud sans restriction et les plumes doie, de dinde, de pintade, teintes, affinées, frisées, « crossées » se prêtent à toutes les métamorphoses, à tous les caprices de la mode. Chez CHANEL, Karl Lagerfeld nen use que discrètement, en franges fines ou en pampilles, plumes et perles mélangées. Pour lui, Monsieur Lemarié, cest dabord « lhomme aux camélias » , celui qui fort de la virtuosité dune main duvre polyvalente plumes et fleurs exigent le même doigté léger et méticuleux peut répondre à tous ses désirs. Parce que, depuis les premiers, commandés par Coco au début des années 60, le camélia, rue Cambon, joue les caméléons. En tweed, en cuir, en fourrure, en satin, en organdi, en plastique, Lemarié en livre quelques 20 000 par an à CHANEL, qui les essaime dans toutes ses boutiques. Il ne demanderait pas mieux que de varier les plaisirs : rose, iris, violette, orchidée, il connaît toutes les fleurs pétale par pétale « mais les modistes nen utilisent plus guère » regrette Monsieur Lemarié qui se souvient de toutes ces architectures mémorables quil a empanachées et fleuries. Mais il y a heureusement des compensations comme cet ensemble en patchwork de crêpe georgette plissé ou ce top du soir, réalisé à la demande de Karl Lagerfeld pour la présentation « Satellite love ».*** Entièrement fait de minuscules camélias de tulle rose pâle, il sinscrit dans la lignée de ces chefs duvre qui font le bonheur de Monsieur Lemarié, la fierté de sa maison et la réputation de Paris. |
LESAGE, brodeur : une histoire cousue de fil dor Les ateliers de la maison Lesage sont installés dans un immeuble ancien, au cur de Paris, tout près de lHôtel des Ventes. Là où transitent chaque année des milliers duvres dart. Chez Lesage, dautres chefs duvre naissent, chaque jour, sous les doigts dune trentaine de petites fées : des broderies destinées aux couturiers français, italiens, américains. Entré aujourdhui dans la galaxie de CHANEL, François Lesage reste le fournisseur de tous les grands noms de la mode. Et, pour Karl Lagerfeld, un partenaire irremplaçable. Chaque saison, celui dont il admire « lintelligence, la culture, la créativité, la rapidité exceptionnelles » lui confie des dessins et des idées sur lesquels il brode. Exemple : les robes « Coromandel » de la collection Haute Couture automne hiver 1996-1997 - inspirées des paravents chinois que collectionnait dans son appartement Gabrielle Chanel - ont nécessité 2 000 heures de travail et, malgré un prix astronomique, se sont tout de même offert le luxe de plusieurs répétitions. Mais si la Haute Couture reste pour François Lesage « le pays des rêves qui se réalisent », cest le Prêt à Porter qui fait tourner sa maison à plein régime. Et assure 80% de son chiffre daffaires. Entre deux collections, « pour ne pas perdre la main » (mais, il lavoue, il ne sait pas tenir une aiguille) François Lesage senferme dans son bureau et met au point une centaine de motifs qui viennent sajouter à son trésor de guerre : 65 000 échantillons, dont des milliers jamais encore utilisés. Classés par couturiers et par thèmes, le tout représente neuf millions dheures de travail, 60 tonnes de fournitures dont du jais de la Belle Epoque, du cristal irisé, des cabochons, des strass, des perles de verre des Années Folles et tous les fils existants. « Toute la broderie en France est partie des gilets brodés du XVIII ème siècle » rappelle François Lesage. Sil a choisi de sévader de cette tradition passéiste, il nen demeure pas moins un héritier, né dans la soie et les paillettes : il a succédé en 1949 à son père, Albert qui, lui, avait travaillé avec Madeleine Vionnet et Schiaparelli. Depuis cinquante ans, cest toujours avec le même entrain que François Lesage grimpe à ses ateliers, au cinquième étage. Avec, souvent, arrêt au quatrième où il a installé une école de broderie. Il sagit dassurer la relève : il reste, soupire-t-il, 200 brodeuses en France et 4 000 000 en Inde. Mais il se veut optimiste : malgré les difficultés du métier, qui exige « des yeux au bout des doigts », la main duvre est exceptionnellement fidèle. Et passionnée : « brodeuse, on le reste un jour ou une vie ». |